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L'absence

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Auteur : Jean-Jacques Goldman
Compositeur : Jean-Pierre Goussaud
Editée par : Editions du Chat Noir

Version originale
Année : 1990
Interprétée par : Rose Laurens
Distribuée par :

 

Reprises Où trouver ce titre Retour au menu

Année Interprète Support Référence Pochette
1990 Rose Laurens CD J'te prêterai jamais WM 472 079
1996 Rose Laurens CD The Very Best of Rose Laurens ARC 300 942-2

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Année Interprète Support Référence Pochette
1992 Jean-Jacques Goldman 2 CD Urgence : 27 artistes pour la recherche contre le SIDA Virgin 34013

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Les chansons sont souvent plus belles... Paroles Retour au menu

Le tango lent de ton sang dans mes veines
J'entends battre ta vie plus que la mienne
Quand la nuit rapproche ceux qui sont loin
Le matin prend ma place et je m'éteins

Nulle envie, nulle pensée pour personne
L'absence a tout pris, que l'on me pardonne
Quand on n'est même plus la moitié d'un
Comme un billet déchiré ne vaut rien

Les saisons ne sont plus que de passage
Les couleurs ont déserté mes images
Je reverrai tout quand tu seras là
Je repeindrai tout quand tu reviendras

Je reverrai tout quand tu seras là
Je repeindrai tout quand tu reviendras

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Jean-Marc d'Angio : Sur cet album, Goldman vous a également écrit un texte, "L'absence". Comment s'est faite cette rencontre ?

Rose Laurens : Encore une rencontre magique. Un jour, Jean-Pierre, qui était donc très malade, me fait écouter des musiques qu'il venait de composer. Dont celle de ce qui allait devenir "L'absence". C'était très beau, car il y avait en plus toute la couleur sur la maquette. Comme je savais que Jean-Pierre adorait Goldman, comme beaucoup d'entre nous, je me suis dit que j'allais lui demander un texte. Pas pour moi, mais pour Jean-Pierre. Pour lui, je voulais tout ce qu'il y avait de plus grand. J'appelle donc un copain et je lui dis : "Je sais que tu as les coordonnées personnelles de Jean-Jacques Goldman et j'aimerais que tu me les donnes". Il a un peu hésité, mais a finalement cédé. Pour Jean-Pierre, à ce moment-là, j'aurais fait n'importe quoi.

Jean-Marc d'Angio : Et vous avez appelé Jean-Jacques Goldman ?

Rose Laurens : J'ai pris ma respiration, en me disant que j'allais peut-être me faire jeter, et je l'ai appelé. Je suis tombée sur son répondeur téléphonique. C'était ses enfants, d'ailleurs, qui parlaient. J'ai hésité à laisser un message et finalement, je me suis lancée, je n'avais rien à perdre : "Bonjour Jean-Jacques, on ne se connaît pas. Je suis Rose Laurens. Est-ce que vous voudriez bien avoir la gentillesse de me rappeler. J'ai quelque chose de très important à vous demander. Merci beaucoup". Un, puis deux jours, se passent, sans nouvelle. J'en parle à mon frère qui, bien que fou de Goldman, n'était pas très optimiste : "S'il est aussi extraordinaire que les textes qu'il écrit, il va me rappeler. S'il l'est moins, il ne me rappellera jamais". Plus les jours passaient, plus je me sentais vexée. Et puis, ça m'est sorti de la tête. Jusqu'à un après-midi où ma mère m'appelle et me dit : "Devine qui je viens d'avoir au téléphone ?". Vraiment, je ne voyais pas. Quand elle m'a dit que c'était Goldman, j'étais énervée de ne pas l'avoir eu. Heureusement, maman m'a dit qu'il rappellerait le soir-même à six heures, car elle lui avait certifié que je serai à la maison, vous voyez le tableau. [rires] Le soir, effectivement, j'étais chez moi deux heures avant pour ne pas le rater. A 18 h très très précises, le téléphone a sonné : "Allo Rose, c'est Jean-Jacques. Excuse-moi de ne pas t'avoir appelé avant, j'étais à l'étranger". D'un seul coup, j'ai respiré, puis j'ai commencé à bafouiller comme une fan, complètement nulle. En plus, je ne savais même plus pourquoi je l'avais appelé. C'était nul. Plus j'étais nulle, plus je me disais qu'il devait penser "Elle est complètement con, celle-là". [rires] Finalement, je me suis reprise : "On ne se connaît pas. Je ne vais pas te dire que je t'adore, ce serait nul. Je voudrais juste te demander quelque chose. Est-ce que je peux te faire écouter des musiques que l'on est en train de faire pour mon nouvel album, je voudrais avoir ton avis". Il me répond, "mon avis, tu sais. Je ne suis jamais qu'un musicien. Mon avis n'est pas d'une grande importance." Comme j'ai insisté, il a accepté et m'a proposé un rendez-vous chez moi le lendemain, mais sans horaire précis. Le lendemain, dans la matinée, il était prévu q'un coursier de ma maison de disques vienne me porter un paquet. Alors que j'étais en train de me mettre du mascara sur un oeil, on a sonné à la porte. J'ai regardé par le judas et j'ai vu quelqu'un avec un casque de moto sur la tête. Pensant que c'était le coursier, j'ai ouvert la porte franco, avec le pinceau du mascara dans la main et seulement un oeil de fait. Je le fais rentrer, il enlève son casque et je m'aperçois qu'en fait c'est Jean-Jacques Goldman. Très gênée, je lui explique la méprise et nous partons dans un fou rire de deux minutes au moins. Ensuite, je l'ai fait asseoir et lui ai proposé quelque chose à boire. Puis je lui ai fait écouter plusieurs musiques, en précisant que c'était Jean-Pierre qui venait de les composer. A la fin de l'écoute, il me dit : "C'est extrêmement beau". Là, j'en profite pour lui lancer : "Est-ce que tu écrirais des textes sur ces musiques ?" Il me regarde droit dans les yeux : "Oui, parce qu'elles sont vraiment très belles". Je lui ai alors proposé de partir avec des musiques. Il en a pris trois, en me prévenant qu'il n'était pas certain d'avoir le temps pour écrire les trois, car il préparait son album avec Carole et Michael. Il m'a cependant garanti qu'il en ferait une.

Jean-Marc d'Angio : Quelles étaient donc les deux autres musiques ?

Rose Laurens : Celles d'"Il a les yeux d'un ange" et de "Louis".

Jean-Marc d'Angio : Mais vous étiez consciente qu'il était très sollicité par d'autres artistes ?

Rose Laurens : Bien sûr, sauf qu'il a écrit pour moi en 1989, bien avant qu'il n'écrive pour Patricia Kaas, Céline Dion, Khaled. Il avait juste écrit pour Johnny Hallyday, je crois.

Jean-Marc d'Angio : Comme ça s'est passé ensuite, avec Goldman ?

Rose Laurens : Le temps est passé, j'ai continué de travailler avec Jean-Pierre, reparlant de temps en temps à mon frère - qui est mon confident - de Goldman. Ce dernier me disait que Goldman était très occupé, qu'il n'avait peut-être pas osé me dire non, ce que je ne pouvais pas imaginer. J'ai donc patienté et plus d'un mois s'est passé. A l'époque, j'habitais à Chennevières sur les bords de la Marne. Un matin, je vais prendre mon courrier dans la boîte aux lettres et, au milieu des courriers habituels, une enveloppe attire mon oeil, je l'ouvre tout en continuant de parler machinalement et je vois un bout de papier à en tête dans l'enveloppe. J'essaie de lire cette écriture en pattes de mouche, en me demandant vraiment ce que cela pouvait être. Finalement, je le donne énervée à Jean-Pierre qui lit tout, se décompose et me retend le papier : "Lis-le jusqu'au bout !". Je lis avec plus d'attention, notamment la signature : Jean- Jacques. Je suis restée sans réaction pendant un certain temps et, d'un seul coup, j'ai pris le papier et j'ai commencé à chanter ces mots sur la mélodie : "Le tango lent de ton sang dans mes veines". Et j'ai crié : "C'est le texte ! C'est le texte". Avec Jean-Pierre et mon frère, on a commencé tous à s'embrasser comme des mômes. J'ai compris ensuite que Jean-Jacques avait dû écrire ce texte sur le papier à lettres d'un hôtel, une nuit où il était en Allemagne. J'ai donc rappelé Jean-Jacques Goldman chez lui pour le remercier. Comme il n'était pas là, j'ai laissé un message pour lui faire part de ma joie. Il m'a rappelé huit jours plus tard, car il bougeait beaucoup à cette époque. Après m'avoir demandé si j'aimais le texte, il m'a dit : "Tu vas me dire quand vous êtes en séance pour cette chanson. Parce que j'y viendrai et je vous ferai les guitares". Il a tenu sa promesse, une fois de plus. Il est venu un après-midi, pendant le mixage de la chanson "J'te prêterai jamais". Il est arrivé avec un petit béret sur la tête et deux guitares, s'excusant d'être toujours en avance, se souvenant du gag du coursier. Puis, il s'est mis dans un coin et a attendu. Après avoir entendu plusieurs fois "J'te prêterai jamais", il s'est levé et il est venu vers nous : "Que c'est beau ça, qui a écrit le texte ?". J'ai alors répondu que c'était moi mais que je trouvais ça maladroit, même si j'avais eu envie d'écrire ces mots-là pour Jean-Pierre. Ensuite, il a accordé ses guitares et les a enregistrées. En plus, il m'a proposé de faire les choeurs. Je n'en revenais pas et j'étais même un peu gênée. Il a alors lancé : "Tiens, j'ai une idée" et il s'est mis devant le micro pour nous faire les choeurs, comme ça, d'un trait. C'est vraiment un être exceptionnel, d'une gentillesse vraie, c'est très rare dans ce métier.

Jean-Marc d'Angio : Pourquoi ne pas avoir exploité "L'absence" en single ?

Rose Laurens : Si l'on n'a pas exploité cette chanson en single, c'est un choix délibéré de ma part. Je trouvais tellement beau le fait que Jean-Jacques m'écrive un texte que je n'avais pas envie de faire du marketing avec. Tant pis pour moi. Je ne voulais pas qu'on écoute cette chanson-là avec plus d'attention sous prétexte que c'est un artiste super connu qui l'a écrite.

Jean-Marc d'Angio : Goldman a d'ailleurs repris cette chanson sur l'album "Urgence" en 1992.

Rose Laurens : Tout à fait. Il m'a appelé un jour en me disant : "Rose, serais-tu d'accord pour que l'on cède nos droits de la chanson "L'absence" pour un album carritatif en faveur de la recherche contre le SIDA ?". Il savait de plus que Jean-Pierre avait eu un cancer et que j'étais très concernée par toutes les horribles maladies de ce monde. Je lui ai répondu qu'il n'y avait aucun problème, au contraire, si cela pouvait aider. Puis il m'a annoncé qu'il allait l'enregistrer lui-même. J'ai été très contente.

Jean-Marc d'Angio : Il paraît que Carole Fredericks vous a également écrit une chanson ?

Rose Laurens : Comment savez-vous cela ? Oui, c'est vrai. C'est une superbe chanson très dance qui s'appelle "Real Love". J'espère que je la sortirai dans un prochain album. Carole était vraiment un être d'une douceur, d'une simplicité rare.

Jean-Marc d'Angio : Toutes les autres musiques du quatrième album sont de Jean-Pierre Goussaud.

Rose Laurens : Ce sont les dernières musiques qu'il m'a faites, car l'album est même sorti après sa mort. Il l'a cependant entendu terminé. Durant les pires moments de sa maladie, on l'emmenait en studio en ambulance [avec beaucoup d'émotion dans la voix et les larmes aux yeux] pour qu'il puisse assister aux séances. C'était en même temps extraordinaire et très dur. Jean-Pierre est mort la nuit du mixage de l'album. C'est comme s'il avait attendu que tout soit fini. Il pensait qu'avec cet album, j'allais reprendre ma place. Surtout, il ne voulait pas que j'arrête trop longtemps, car pour lui, cela était risqué. C'est pour cela qu'il a fait l'album, même malade.

Jean-Marc d'Angio : Vous n'avez jamais parlé de tout cela, pourquoi ?

Rose Laurens : Non, jamais. Par pudeur. Il y a des choses qui n'appartiennent qu'à deux êtres humains.

Rose Laurens au pays des géants
Platine n°90, avril 2002
Propos recueillis par Jean-Marc d'Angio


Jean-Jacques Goldman : C'est je crois un peu le même cas que Catherine Ferry : son mari ou ami lui avait composé une chanson qu'il n'avait pas eu le temps de finir...

J.J. Goldman auteur, compositeur...
Solo n° 2, novembre / décembre 1997


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