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La patiente fructification de Céline Dion
(Le Devoir, 30 mars 1996)

La patiente fructification de Céline Dion
Le Devoir, 30 mars 1996
Rémy Charest, Sylvain Cormier
Retranscription de Monique Hudlot

On apprenait l'autre jour, par un communiqué du légendaire réalisateur de disques Phil Spector envoyé au magazine Entertainment Weekly, que l'enregistrement amorcé d'un album avec Céline Dion avait tourné court parce que l'entourage de la chanteuse "était plus intéressé à maintenir le contrôle sur le projet qu'à écrire l'histoire".

On comprend la prudence du gérant-époux René Angelil et des gens de chez Sony : Spector a certes été génial en son temps, créant un son bien à lui (le célèbre "Wall Of Sound") et multipliant ses "little symphonies for kids" qui firent la gloire des Ronettes, Crystals et autres Righteous Brothers, mais c'est également un fou paranoïaque notoire. N'empêche que c'est diablement dommage. On aurait aimé entendre ce que Spector a tiré d'un tel coffre. La voix de Céline, plus encore que celles de Ronnie Spector ou Darlene Love à l'époque, est l'instrument que maître Philip a cherché toute sa vie, entièrement malléable, au registre presque illimité. Gageons qu'il a pu lui faire répéter la même note vingt milliards de fois, encore plus longtemps que les six heures imposées à Tina pour l'intro de "River Deep Mountain High" en 1966 : Céline est la plus travaillante des chanteuses de la planète pop.

On le sait depuis "D'Eux", l'album que Jean-Jacques Goldman lui a si intelligemment concocté (quatre millions d'exemplaires écoulés au dernier décompte) : Céline est la meilleure quand elle est entourée par quelqu'un de valable qui sait ce qu'il veut d'elle. Laissée à elle-même, comme en spectacle, c'est généralement l'enflure, les doubles saltos renversés, les quatre fers en l'air : elle en rajoute partout, incapable de comprendre d'instinct ce que la chanson exige. Comme Whitney Houston et Mariah Carey, ses principales rivales, avec qui elle partage cette absence de prise à la terre (le ground), son don vocal doit être canalisé : c'est précisément ce que Goldman a fait, s'assurant que l'émotion d'une phrase musicale ne s'épivardait pas en mille acrobaties, obligeant Céline à "tenir la note" au lieu de faire des galipettes autour. Le résultat, plus que probant, a fait du bien à Céline, qui a le mérite de retenir ce qu'on lui enseigne.

"Falling Into You", son nouvel album américain (déjà au sommet des classements!), en bénéficie grandement. C'est évidemment remarquable sur "If That's What It Takes", "I Don't Know" et "Fly", les adaptations des chansons de Goldman. Le ton est juste, plus mesuré plus jamais : Céline a vraiment appris à refréner ses ardeurs. D'autres titres en sortent gagnants : "Because You Loved Me", la chanson du film "Up Close And Personal", ainsi que la chanson-titre. Le résultat, de fait, varie selon l'entourage. Soutenue sur "It's All Coming Back To Me Now" par des gens aussi compétents que Roy Bittan (claviériste du Street Band de Bruce Springsteen), Kenny Aronoff (batteur de John Mellencamp) et Todd Rundgren, la chanson à grand déploiement de Jim Steinman (collaborateur de Meat Loaf) parvient à éviter la grandiloquence. C'est évidemment moins vrai quand Céline tombe entre les grosses pattes d'Aldo Nova, subtil à la console comme Mike Tyson dans le ring, qui renforce la tendance à l'excès de la chanteuse. Et la version toutes vannes ouvertes de "River Deep, Mountain High" est exactement l'immense gâchis qu'un Spector aurait seul pu éviter.

Bref, aussi loin que l'on se tienne de la Dionmania, il est difficile de ne pas admettre que Céline, la chanteuse, progresse. Dans le créneau pop adulte, où l'uniformité, les mélodies passe-partout et les arrangements pasteurisés sont la norme, elle s'applique avec une assiduité qui force l'admiration. Ce qui ne veut pas dire qu'on aime vraiment l'album, ni qu'on va le réécouter. On mesure le chemin parcouru, voilà tout. Sacrée trotte.


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