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Goldman, ça suffit.
(Télémoustique, décembre 1988)

Goldman, ça suffit.
Télémoustique, décembre 1988
Jean-Luc Cambier

Neuf concerts, cela suffira. Il n'y en aura pas de dixième, bien que la demande existe. Il fallait un jour s'arrêter, ce sera le 29 janvier. Jean-Jacques Goldman aura attiré finalement 72 000 personnes, puisque la 9è date est maintenant complète sans même qu'une affiche ne soit collée et sans que les médias ne s'y mettent autrement qu'en annonçant l'ouverture des locations successives. Voilà, c'est très bien et les chiffres tiennent de l'exploit. Mais maintenant ça suffit. Ça suffit de lire "des stars ordinaires" à gauche ou à droite, des "un homme normal" au centre. C'est de bien autre chose qu'il s'agit, de bien plus.

Vient de sortir un livre abondamment illustré chez Albin Michel. Un livre court dont le texte n'est guère qu'un article un peu long, biographique et enthousiaste. Mais ce livre est hanté d'une obsession, celle de son auteur, Patrick Amine qui se proclame "inconditionnel de la sobriété incarnée par Jean-Jacques Goldman" . Au nom de cette sobriété, par respect, puisque lui-même en fait si peu et rêve d'en remettre moins encore, on s'est trop souvent contenté de reformuler les mêmes compliments, de trouver de nouvelles anecdotes pour prouver plus indiscutablement, s'il en était encore besoin, les mêmes évidences. Alors on redit combien le succès ne l'a pas changé, comme si on le connaissait auparavant, et que pour être star il n'en est pas moins homme, comme si les hommes étaient tous faits à l'image de Goldman.

Il y aurait déjà des conclusions définitives à tirer de cette autocensure que s'imposent volontairement les journalistes qui l'ont approché. Il y a des choses qu'on voit et qu'on ne dira pas, qu'on apprend, qu'on sait et qu'on ne répétera pas. Rien d'inavouable de toute façon, mais on ne voudrait pas être moins fair play que lui en enfreignant les règles du jeu. Ne pas être star (comme si ce mot était synonyme de péché), ce n'est pas seulement vivre en famille et ne pas fréquenter les endroits à la mode. C'est ne pas se permettre que ce statut vous donne comme droits contre l'homme. Quand on voit comment le moindre petit bout d'homme investi d'une infime portion de pouvoir en use et en abuse, on mesure quelles devraient être les tentations de Goldman. "Il faut plus de vertus pour soutenir la bonne fortune que la mauvaise" écrivait voici deux siècles un moraliste qui pourtant ne pouvait imaginer ce que "bonne fortune" voudrait dire quand cela se traduit par des centaines de milliers de spectateurs au pied des scènes où vous jouez.

Alors Jean-Jacques Goldman n'est pas un homme banal parce que l'humain ne possède ni son pouvoir ni ses vertiges. Je ne suis d'ailleurs pas sûr que l'être humain moyen soit aussi honnête, sensible et bon que Jean-Jacques Goldman. Ça suffit donc ces articles qui le trouvent mou, gentil avec tout le monde et au hasard. Le voudraient-ils dur, cruel, cynique ? Est-ce que les journalistes sont assez vulgaires pour penser que la méchanceté est la meilleure preuve de l'intelligence ?

Puisque Libération a donné l'information, nous la relayons, maintenant qu'il est hors d'atteinte. Le père de Jean-Jacques, Alter Mojze Goldman, est mort le jeudi 1er décembre. Avant que ne paraisse la note de Libé, il aura tenté de le cacher à quasiment tout le monde pour que rien ne change autour de lui, que le moins de monde possible ne soit pris entre la peine partagée et les obligations de la scène. Chaque soir, après le concert, il rentrait chez lui et revenait pour le concert suivant. Pendant quasiment tous les soirs bruxellois, il aura donc joué avec le deuil en tête. Et il y avait de quoi être ému quand on pense aux textes qu'il chantait : de "tu es de ma famille" à "Puisque tu pars". Je viens d'assister à son dernier concert de cette première vague, et pendant tout le spectacle, je n'ai pu m'empêcher de penser à ce qui devait se passer dans sa tête. Et déjà je retournais des phrases pour tenter de dire le plus justement combien ce fut superbe, et ce que cela signifiait aussi qu'il tienne à être sur scène et qu'il y trouve probablement un réconfort. Il n'est guère d'artistes pour aimer autant leur musique et leur public. Et même il n'y a pas beaucoup d'hommes pour réagir comme il l'a fait, en faisant sa peine discrète pour qu'elle n'incommode pas la vie des autres. Alors si j'écris ces quelques lignes trop personnelles pour ne pas être maladroites, c'est qu'il faudrait que le public sache qui il aime. Ce n'est pas rien de l'admirer et de vouloir un peu le mériter. Nous n'avons pas le problème d'être une star à visage humain, mais ce ne serait pas déjà si simple d'être parfois un homme sur ce modèle.


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