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Hexagone
(Rock and Folk, décembre 1981)

Hexagone
Rock and Folk, décembre 1981
Jean-Marc Bailleux
Retranscription de Marie-Laurence Cuvillier

Nom : Goldman
Prénom : Jean-Jacques
Né le : 11 octobre 1951 à Paris
Catégorie socio-professionnelle : Marchand d'articles de sport, auteur, compositeur, guitariste et chanteur
Discographie : Plusieurs simples et trois albums avec Taï Phong (WEA) ; sous son propre nom, "Jean-Jacques Goldman" (CBS - EPC 85233)

Rock & Folk : Quand as-tu quitté Taï Phong ?

Jean-Jacques Goldman : J'ai fait tous les disques. En fait, je suis parti sans partir quand ils ont décidé de tourner. Pour différentes raisons, je ne voulais pas partir en tournée avec eux. Alors, ils ont engagé d'autres musiciens pour le faire.

Rock & Folk : Pourquoi ne voulais-tu pas tourner ?

Jean-Jacques Goldman : Parce que c'était une musique qui m'intéressait énormément en studio, mais je pensais que cela ne m'apporterait rien de la jouer sur scène, et qu'à l'époque où ils se décidaient à le faire, il n'était plus le temps.

Rock & Folk : Mais les tournées de Taï Phong, ça a toujours été plutôt l'Arlésienne.

Jean-Jacques Goldman : Ça n'a jamais vraiment eu lieu, sinon d'un point de vue purement local, dans la banlieue sud, pour tester. Ensuite, le groupe a fait quelques dates par ci par là et je suis revenu pour enregistrer l'album. Tout cela couvre de 75 à 79. Puis j'ai eu l'impression de tourner en rond. Ce que nous faisions n'était plus à la mode. J'ai eu envie avant tout de faire autre chose.

Rock & Folk : Le groupe n'existe plus aujourd'hui ?

Jean-Jacques Goldman : Non. Il y a eu des tentatives de reformation, sans succès. En gros, il y en a un qui a monté une boutique de musique, un autre qui fait la manche dans le métro, deux qui font des séances en studio ; à ma connaissance, je suis le seul qui fasse encore des disques.

Rock & Folk : Le dernier album de Taï Phong date donc de deux ans : depuis, que s'est-il passé ?

Jean-Jacques Goldman : J'ai commencé à faire des disques chez WEA en tant que chanteur. Je procédais complètement à l'inverse d'avec Taï Phong : je confiais mes maquettes à des arrangeurs et je ne venais au studio que quand la musique était pratiquement enregistrée. C'était à la limite de la variété, tout-à-fait dans le genre "truc qui devrait marcher" et, précisément parce que c'était fait pour cela, ça ne marchait pas. Et puis, petit à petit, je me suis désintoxiqué du boulot colossal que représentait le travail de Taï Phong en répétition, et je me suis vraiment remis à travailler. J'ai fait des maquettes en place et complètes, dans ma cave, et je les ai confiées à un éditeur qui les a présentées aux maisons de disque. Je voulais changer de boîte parce que le principal défaut de WEA, c'est que tu y fais tous les disques que tu désires. Une fois que tu as un contrat, ils acceptent tout ce que tu leur présentes, que ce soit bon ou mauvais ; et puis le disque sort et tu n'en entends plus jamais parler. Ça n'est pas ça, rendre service à un artiste.

Rock & Folk : Tu n'as pas un peu l'impression de cracher dans la soupe et de refuser ce qui est le rêve de bien des musiciens qui ont le problème inverse de maisons de disques qui font interminablement refaire toutes les maquettes et refusent tout ce qu'on leur présente ?

Jean-Jacques Goldman : Tu as raison, mais en ce qui me concerne, faire des disques pour faire des disques, cela ne m'intéresse pas et c'est une énorme perte de temps.

Rock & Folk : Et toi, tu fais des disques pour quoi ?

Jean-Jacques Goldman : Pour que ça marche ; pour en faire d'autres dans des conditions toujours meilleures. Chez WEA, tu peux passer ta vie à faire des disques qui ne marchent pas avec des budgets qui n'évoluent pas. Ici, j'ai été obligé de retravailler certains morceaux pour arriver à un produit satisfaisant pour tout le monde. C'est positif.

Rock & Folk : N'as-tu pas l'impression que la plus grosse part de tout ce qui se produit en France est totalement gratuite, et que la plupart des artistes font des disques soit comme ils jouent au loto, soit parce qu'ils y sont obligés par un contrat ?

Jean-Jacques Goldman : En ce qui me concerne, je crois avoir résolu ce problème en gardant toute mon indépendance. D'abord, pour ce qui est de la gratuité, mon disque est un premier album, et comme tous les premiers albums, il y a du bon et du moins bon, mais rien n'est gratuit. Le premier disque n'est jamais gratuit, c'est celui au contraire où on a toujours trop à dire, celui que l'on met des années à réaliser et où tout est pesé, choisi. Maintenant c'est un autre problème : mon disque est sorti et le suivant est déjà prévu pour mai. J'ai huit mois pour faire un album. Ce n'est qu'à ce moment-là que commence à se poser pour l'artiste le problème du remplissage, de la gratuité. Mais en fait, pour moi, ce n'est pas un problème parce que d'emblée, j'ai décidé de ne pas dépendre de mes activités de musicien.

Rock & Folk : Est-ce à dire que tu considères qu'artiste n'est pas ton métier ?

Jean-Jacques Goldman : Non seulement ce n'est pas mon métier, mais en plus, j'affirme que ce n'est pas un métier, ou plutôt que ça ne doit surtout pas en être un.

Rock & Folk : Pourtant, comme tout le monde tu es pris dans le système plus ou moins explicite des règles qui régissent tes rapports avec ceux qui t'emploient. Tu n'as guère le choix qu'entre être un cynique ou un dilettante et ne pas satisfaire les attentes de ta maison de disques, ou bien un bon élève et risquer de te perdre à jouer un jeu vide de tout contenu ?

Jean-Jacques Goldman : Si demain j'héritais d'un milliard, je peux te dire que j'arrêterais immédiatement de faire ce qui actuellement me fait vivre ; ce n'est pas une urgence pour moi de vendre des baskets. Par contre si je continue de le faire, c'est précisément parce que je ne veux pas que mon activité musicale dépende de considérations alimentaires. Je ne le supporterais pas parce que je ne supporterais pas de faire autre chose que ce que j'ai envie de faire ou de devoir quoi que ce soit à mes chansons sous prétexte que je dois faire vivre ma famille.

Rock & Folk : Si je comprends bien, tu revendiques le maximum de liberté et d'indépendance, et pourtant tu es parti de chez WEA parce qu'on t'y disait amen à tout.

Jean-Jacques Goldman : En tous cas, je ne revendique pas de ne pas être contradictoire. Ceci dit, si je suis parti de chez WEA, c'est parce que leur politique mène à l'échec. Disons que d'un côté, je refuse de faire des chansons pour vivre, de l'autre je sais que j'ai besoin de gens pour me faire avancer. Ce qui ne me plaisait pas auparavant, c'est que tout le monde trouvait tout ce que je faisais génial et que ça me servait à rien puisqu'il ne se passait rien ; soit ils se trompaient, soit ils étaient incapables d'en convaincre les autres. Alors qu'ici, je suis arrivé au milieu de commerçants et de gens qui se sont fait un écho de ce que je faisais, m'ont fait travailler plus et m'ont aidé par là à travailler. Le problème n'est pas de subir ou non des contraintes de la part des maisons de disques, mais d'avoir le talent de reconnaître dans ce qu'on te demande ce qui est bon et profitable de ce qui est n'importe quoi : faire la part des choses et s'en servir pour progresser.

Rock & Folk : Mais crois-tu que ta merveilleuse indépendance soit compatible avec les impératifs commerciaux et autres d'une grande maison de disques ?

Jean-Jacques Goldman : Ce que je crois, c'est qu'il n'y a pas de système. Il est aussi vain d'être ce que tu appelles un bon élève qu'un dilettante. Ça n'a rien à voir avec la finalité de ton produit. Ajoutons à cela que, dans la chanson, on vit une époque qui favorise l'indépendance d'esprit. Il y a de moins en moins de contraintes : les vieux stéréotypes du showbiz sur ce qui marche et ce qui ne marche pas, sur ce qu'il faut faire ou ne pas faire pour que ça marche ont de moins en moins cours. Il n'y a plus de recette, sinon qu'il faut qu'il se dégage quelque chose d'assez fort de ce que tu donnes à entendre. C'est la sincérité qui est en train de prévaloir sur le système, sur la mode. Du temps de Taï Phong, la mode c'était le rock symphonique ; quelqu'un qui arrivait dans une salle et jouait du hard-rock était comme un orang-outan dans un magasin de dentelles. Aujourd'hui, au hit-parade, tu as pêle-mêle Stray Cats, Grace Jones, Cabrel, AC/DC et Capdevielle.

Rock & Folk : C'est le retour à la variété dans tous les sens du terme.

Jean-Jacques Goldman : Parfaitement et j'ADORE ça. Je crois que seules les maisons de disques sont restées à la traîne. Le public les devance ; même les media ont beaucoup évolué. Tout s'est diversifié, tout s'est ouvert, seules les maisons de disques ne font que suivre des mouvements dont l'impulsion est ailleurs.

Rock & Folk : Si tu n'étais pas Jean-Jacques Goldman, qui souhaiterais-tu être ?

Jean-Jacques Goldman : Marilyn Monroe.


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